vendredi 20 janvier 2017

La démocratie en crise



D'après une définition de 1929, la Démocratie consiste dans l'exercice, soit direct, soit indirect, du pouvoir par le peuple. Cette organisation politique implique un état social caractérisé par le fait que tous sont égaux devant la loi, que tous possèdent les mêmes droits (Encyclopédie Larousse du XXe siècle). Selon Péricles repris par Abraham Lincoln c'est "le gouvernement du peuple, par le peuple, pour le peuple". Historiquement, la démocratie est apparue comme LA solution pour anéantir les systèmes totalitaires puis est devenue un symbole avec la chute du mur de Berlin et le retour aux libertés fondamentales.
Elle s'articule autour des principes démocratiques tels que la règle de la majorité , une constitution qui définit et protège les droits et libertés des citoyens, la séparation des pouvoirs, la consultation régulière du peuple ou encore la pluralité des partis politiques. La démocratie est fondée sur la souveraineté populaire, la séparation des pouvoirs ainsi que sur le respect des libertés fondamentales.

Les prémices de la crise citoyenne se  ressentaient dans les thèses du professeur Rosanvallon déjà en 2006 lorsqu'il affirmait que la démocratie était minée de l'intérieur, par la montée des extrêmes, l'abstentionnisme chronique et le manque de confiance des citoyens vis à vis de la classe politique.

La constitution de 1958 a concilié la souveraineté nationale et populaire en son article 3 lorsqu'il accorde l'exercice du pouvoir au peuple par le biais de ses représentants et le référendum. Mais voila en France il y a de plus en plus de méfiance vis à vis de nos représentants. Car même si l'élection symbolise la prise de parole, les derniers quinquennats démontrent que les électeurs se désolidarisent rapidement de leur vote. En 2012, François Hollande paraissait comme étant la solution pour redorer la puissance de l'exécutif mais après 5 années à l'Elysée, son quinquennat est autant critiqué que l'a été celui de Nicolas Sarkozy. Le manquement aux promesses de campagne et les décisions radicales ne font qu'aggraver la révolte citoyenne.

Y-a-t-il un abus dans l'utilisation du pouvoir? Je nomme à ce titre le 49.3, utilisé 3 fois entre 2002 et 2007 et 6 fois par Manuel Valls. Mais ce procédé est-il antidémocratique pour autant? Voici les explications de Me Turan: "Je ne trouve pas que le 49.3 soit anti démocratique, c'est la décision du parlement élu par le peuple. Les parlementaires peuvent décider de renverser le gouvernement suite à cela et s'ils ne le font pas c'est qu'ils le soutiennent  Le peuple était contre le 49.3, pas contre le fait que les parlementaires ne renversent pas le gouvernement Valls, donc le parlement a respecté la volonté des citoyens". L'usage de cet article est un coup de force certes, mais il reste légal . La révision constitutionnelle de 2008 avait envisagé de le supprimer de la constitution même si elle l'a maintenu par mesure de "précaution" pour les lois de finance.

Et l'élection de Trump alors? C'est la preuve même que la démocratie fonctionne. Il a été élu 45e président des Etats Unis malgré ses frasques, ses propos déplacés et sa personnalité antipathique. C'est un peu le revers de la médaille. La montée des extrêmes est facilitée par cette même démocratie qui permet l'élection de figures populistes dévalorisant la sphère politique (mais il s'agit là du prochain article). 

La solution à ces querelles ne serait pas de penser à une démocratie participative? Rosanvallon proposait la mise en place d'un ensemble de réformes pour restaurer la confiance des citoyens, à commencer par la dimension locale. En l'état actuel des choses, les politiques même s'ils exercent leurs fonction légitimement, n'incarnent pas la réalité. Le Hollande bashing, les manifestations anti loi travail et d'autres ont démontré que les décisions prises ne concordaient pas avec la volonté populaire. 

J'ai demandé à une autre de mes camarades juristes de réagir au titre de cet article, voici ses propos: 
<<A mon sens, la démocratie en crise est l'état assez récurrent de nos démocraties. Je ne dresse pas là un constat pessimiste de nos gouvernements. D'ailleurs, Winston Churchill partageait peut être mon avis, lui qui affirma: "la démocratie est le pire des régimes -à l'exception de tous les autres déjà essayés dans le passé". Ainsi, il me semble que c'est la nature même de la démocratie que d'être en perpétuelle recherche d'équilibre sans jamais le trouver. La démocratie n'est en fait pas une chose vivante, elle demande à faire l'objet de recalibrage incessant. C'est à nous, peuple, constituant la souveraineté populaire qui légitime nos politiciens à avoir une place au pouvoir, d'exiger avec aplomb le respect de nos droits inaliénables, de tenir nos élus pour responsable de leurs actes et d'exiger, en ces temps de campagne présidentielle, un discours de qualité sur les sujets qui affectent tous les citoyens>>. 

Hans Kelsen, théoricien du droit détaché de toute considération morale ou politique, disait que la démocratie survivrait même à la disparition des droits fondamentaux "pourvu que l'ordre étatique fut créé par les individus, qui y sont soumis". La démocratie est ancrée dans notre organisation étatique mais elle a perdu de sa valeur. C'est à nous, pouvoir constituant d'agir et rappeler aux représentants élus qu'ils ne doivent agir que pour l'intérêt général et se déconnecter de la technocratie élitiste. Saisissons-nous déjà du pouvoir suprême que nous détenons, incarné par la carte d'électeur puis demandons plus de lisibilité de l'action politique. 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire